Nous ouvrons notre exposition d’automne sur l’eau, une composante de la vie fascinante et rare qui anime le dernier travail de l’artiste villeneuvois David Tresmontant.  La fécondité, la purification, l’inondation et la sécheresse, la soif et la vitalité… Cet ancien ingénieur forestier, devenu plasticien, réinvestit ces grands thèmes nous montrant comment l’eau respire selon des couleurs, des formes et des cycles, apparaissant plus comme un mouvement qu’une matière. Cet expert du reboisement naturel, du paysage français, et créateur de nombreux nuanciers naturels perçoit les couleurs, les espaces… selon les liens qui unissent l’homme à cette géographie des sites. Il en isole les strates historiques grâce à de longues observations et notes d’impression sur le vif puis nous restitue en atelier les matières, les lignes de forces de ces paysages. Des configurations, des sensations qui nous sont familières mais qui semblent formulées dans un autre dialecte, échappé de nos songes et de nos torpeurs d’enfant…

S’accorder avec le vivant

Peintre, plasticien et ingénieur forestier honoraire, David Tresmontant étudie tout particulièrement les liens sensibles qui nous unissent à la nature et la manière dont elle peut nous parler.
Dans son métier sylvicole, il n’a eu de cesse d’imaginer des solutions afin de mieux intégrer les activités et les aménagements de l’Homme dans l’ensemble des écosystèmes, des paysages et des sites naturels. Une façon de repenser le paysage mais surtout faire évoluer le regard sur nos paysages coutumiers.
Des œuvres qui convoquent la nature
Une reconnaissance intuitive de la nature avant d’être intellectuelle. « Le métier d’artiste est en quelque sorte un métier de traducteur, d’évocateur. Non pas copieur d’éléments extérieurs, ni inventeurs de fables, mais indicateur des lieux intimes qui s’accordent, qui sont en harmonie avec des espaces, des instants, des sujets. (…) De manière à ce que le spectateur, à son tour, puisse être étonné de reconnaître sa proximité avec l’œuvre, et, plus tard, qu’il regarde la nature avec cette nouvelle interprétation », nous soumet l’artiste villeneuvois.
Dans ce jeu de regards, David Tresmontant se sent proche de grands coloristes comme Pierre Bonnard ou Mark Rothko, des configurations de Félix Vallotton, Nicolas de Staël ou encore Serge Poliakoff. On compare souvent son travail à celui de Vincent Bouliès, ce qui n’est pas pour lui déplaire.

Le chemin de l’eau

Avant d’arriver à cette transposition sensible dans ses toiles, cet ingénieur a observé la croissance des végétaux, des arbres, a étudié leur lente chorégraphie, faussement bohème mais au contraire on ne peut plus rationnelle, épousant la rigueur des variations musicales. David Tresmontant peint depuis déjà plus de trente ans par le biais de très nombreuses études topographiques où l’art est venu appuyer son métier de forestier sous forme de nuanciers, dessins, peintures ou par des collages et des textes. Désormais ses collages, encres, huiles sur toile fluides (juste maintenues par des baguettes), huiles sur bois… savent aussi se faire objets d’art nous ouvrant de nouveaux espaces, fenêtres étroites ou large triptyque.Sa dernière série présentée à l’abbaye Saint-André tente de suivre un élément par essence insaisissable : l’eau. Mouvement avant d’être matière. L’eau circule entre ciel et terre ; elle se transforme, s’unie ou se sépare d’avec les autres éléments et les êtres vivants ; elle compose avec la vie et la mort. A commencer par le renouvellement grâce aux pluies de printemps qui apporte germination et floraison, puis la transformation de cet élément multiforme, l’eau qui respire par les végétaux, en milieu humide comme en milieu sec. Et enfin l’eau porteuse de nombreuses symboliques pour l’Homme et genèse de certains mythes comme la fontaine de Poliphile. Un parcours pictural des plus évocateurs qui rentre naturellement en résonnance avec les problématiques actuelles pour lesquelles David Tresmontant nous suggère de nouvelles pistes plus intimes.

 

 

3 visites des « Respirations de l’eau » accompagnées de lecture :

David Tresmontant aime croiser les points de vue qu’ils soient réels ou artistiques et toutes les formes de créations afin de condenser les émotions, exacerber les sensations. Pour souligner l’accrochage des « Respirations de l’eau », il a imaginé deux visites avec des lectures de textes et une visite guidée suivie d’une lecture des paysages depuis les grandes terrasses de l’abbaye.
Samedis 9 et 23 septembre à 10h : visites de l’exposition par l’artiste accompagnées de lectures. Sur réservation.
Samedi 7 octobre à 10h : visite de l’exposition par l’artiste avec lecture des paysages proches et lointains depuis les jardins.

Sur réservation info@abbayesaintandre.fr

Un ingénieur plasticien
Né en 1957 en région parisienne, David Tresmontant fréquente l’école expérimentale l’Ecole Nouvelle d’Antony qui lui donne le goût de la création et de la musique, s’ensuit une révélation adolescente face à l’exposition Bonnard au Grand Palais. Passionné de nature, il passe le concours de l’ONF et devient ingénieur forestier puis écume les forêts et parcs de France : La Rochelle, Bois de Boulogne, Versailles, Bagatelle. Il s’intéresse très rapidement à la place de l’Homme dans ses forêts et ses relations avec ces espaces naturels. Riche de ces observations et de ses études sur la régénération naturelle, il va proposer des reboisements à « figure naturelle » dans le secteur de la porte Dauphine, puis dans les sites détruits par les tempêtes de 1990. Selon cette même démarche, bien plus proche, il imaginera la création du « verger libre » un verger de figuiers planté dans la plaine de l’Abbaye à Villeneuve les Avignon, au pied de l’abbaye Saint-André.
Car à partir de 1992, il s’installe dans le midi et gère des sites naturels et patrimoniaux des Bouches-du-Rhône comme l’abbaye de Pierredon dont les 650 hectares avaient brulé aux trois-quarts. Comment alors reconstituer un paysage des Alpilles avec ses équilibres, ses strates de « vaste jardin méditerranéen redevenu sauvage » ? Lui vient alors l’idée de créer un nuancier de cette palette naturelle propre à chaque territoire, traduit en RAL, il commencera avec le massif de la Montagnette puis ce sera la Camargue. Les topologies des lieux et leurs proportions sont aussi décortiquées : « Les cultures et les chemins doivent éclore et traverser les paysages en se mariant avec eux. Les vergers et les vignes doivent être des invités plutôt que des conquérants », suggère-t-il.
Spécialiste de ces questionnements sur nos paysages, il a publié de nombreux ouvrages tels « Le Rhône est plus grand » édition Couleurs de la Nature ; « La forêt sacrée de la Sainte Baume » avec Claude Darras éditeur Naturalia ; « La forêt de Boscodon » avec Claude Darras éditeur Naturalia et participé à des conférences sur le sujet.
Nourri de la musique qu’il pratique assidûment, en tant que joueur de flûte, et de son approche originale du paysage, David Tresmontant a choisi l’art comme vecteur de dialogue avec la nature. Il a mis fin à sa carrière de forestier en 2019 afin de se consacrer pleinement à son travail de création.

Plus d’infos sur : www.davidtresmontant.com